Prévision d’inflation : 3.4% pour 2023 et 4.8% pour 2024

Au Luxembourg, les prix à la consommation ralentissent depuis octobre 2022 sous l’effet des mesures de l’Accord tripartite qui permettront de contenir l’inflation au cours de 2023. Le STATEC maintient à 3.4% sa prévision d’inflation pour cette année et anticipe une tranche indiciaire au dernier trimestre 2023. La levée des boucliers tarifaires au tournant de l’année pousserait l’inflation à 4.8% en 2024. Ce rebond résulterait principalement des tarifs du gaz et de l’électricité qui reflèteraient de nouveau les prix réels d’achat sur les marchés de gros. Une indexation est également prévue au 2trimestre 2024.

Au Luxembourg, l’inflation est en net ralentissement depuis octobre 2022. Avec 4.8% sur un an en janvier 2023, elle est passée sous la barre des 5% pour la première fois depuis 1 an. Cette tendance à la baisse devrait se poursuivre tout au long de 2023. L’inflation sous-jacente (hors produits pétroliers surtout) en revanche garde un rythme soutenu et se maintient au-dessus des 3% en 2023. Cela découle de la répercussion retardée de l’emballement des prix de l’énergie au cours de 2022. Ainsi, les produits alimentaires et les biens industriels non-énergétiques continuent de se renchérir.

En 2023, l’inflation devrait demeurer contenue au Grand-Duché en raison des mesures étatiques permettant de freiner tant les prix des produits pétroliers (qui incluent le gaz) que l’inflation sous-jacente (qui inclut l’électricité). Après la levée des boucliers tarifaires, prévue au 1er janvier 2024, et en l’absence de nouvelles mesures, l’inflation devrait rebondir puis décroitre lentement au fil des mois.

Taux d’inflation annuel et contributions

Révisions à la hausse de l’inflation en zone euro…

Depuis novembre 2022, soit l’établissement des dernières prévisions d’inflation, la conjoncture économique mondiale a significativement évolué. Parmi les événements récents à l’international, le plus significatif pour l’inflation est la fin de la politique « zéro COVID » en Chine. A long terme, cela devrait fluidifier davantage les chaînes d’approvisionnement et avoir un impact négatif sur l’inflation mondiale. Néanmoins à court terme, la reprise de l’activité chinoise pourrait faire pression sur les prix des matières premières, notamment le pétrole, et freiner la chute de l’inflation dans les économies avancées.

En zone euro, sous l’effet du ralentissement des prix de l’énergie, l’inflation totale recule depuis octobre 2022, alors que l’inflation sous-jacente continue d’accélérer. Dans ce contexte, l’annonce récente que la BCE fera tout ce qui est nécessaire pour ramener l'inflation à son objectif de 2% sous-entend des hausses de taux d'intérêt significatives lors des prochaines réunions du Conseil des gouverneurs. Des engagements similaires ont été pris aux USA où l’inflation ralentit depuis juin 2022. Cela devrait maintenir le cours de l’euro vis-à-vis du dollar au-dessus de la parité.

Malgré le resserrement de la politique monétaire, les principales institutions internationales anticipent toujours une inflation en zone euro supérieure à 2% en 2023 et 2024. En effet, entre fin novembre 2022 et janvier 2023, le Fonds monétaire international, la BCE et l’OCDE ont révisé à la hausse le taux d’inflation prévu en zone euro tablant, en moyenne, sur une progression de 6.2% en 2023 et de 3.4% en 2024 (contre 5.8% et 2.5% précédemment).

Les nouvelles prévisions émanant d’Oxford Economics tablent sur le freinage des prix de l’énergie et de l’alimentation en zone euro à partir du 2e trimestre 2023, suivi d’un recul de l’inflation sous-jacente à partir du 3e trimestre 2023. Le prix du Brent est revu à la baisse – à près de 85 USD/baril en 2023 (contre 96 précédemment). Cette baisse est amplifiée par l’appréciation du taux de change de l’euro vis-à-vis du dollar. Avec une valeur moyenne de 1.06, le cours de l’euro est révisé à la hausse et se trouve au-dessus de la parité en 2023 et 2024 (0.99 USD/EUR précédemment). Les effets baissiers de l’appréciation de l’euro et la diminution du prix du Brent sur l’inflation seraient néanmoins compensés par la récente envolée des prix des produits alimentaires et des services en zone euro qui se répercutent sur les prix à la consommation au Luxembourg.

…mais une inflation contenue au Luxembourg en 2023

Le STATEC maintient à 3.4% sa prévision d’inflation pour cette année et anticipe une remontée à 4.8% pour l’année prochaine. L’inflation sous-jacente est légèrement révisée à la hausse et se situerait à 3.9% en 2023 (contre 3.7% précédemment) et à 4.3% en 2024.

Au Luxembourg, les mesures étatiques sur les prix de l’énergie mises en place au cours de 2022 ont permis de contenir l’inflation. Ainsi, tout au long de 2023, le prix du gaz payé par les ménages n’augmentera pas de plus que 15% par rapport à sa valeur de septembre 2022, le prix de l’électricité ne connaîtra pas d’augmentation dans l’année et le prix du mazout de chauffage bénéficiera d'un rabais de 15 centimes d’euro par litre. De manière plus générale, les prix devraient diminuer (ou progresser moins) sous l’effet de la réduction des taux de TVA (normal, moyen et réduit) d'un point de % depuis le 1er janvier 2023. En l’absence de ces mesures, le prix du gaz aurait connu une hausse de 92% en 2022 et de 33% en 2023 suite à l’envolée des prix du marché jusqu’à l’été 2022. Le renchérissement du gaz aurait également eu des implications sur le prix de l’électricité qui aurait connu une hausse de 69% en 2023. Dans cette situation contrefactuelle, l’inflation aurait atteint 7% en 2022 et 7.5% en 2023 avec 6 dépassements de la côte d’échéance entre mars 2022 et le 4e trimestre 2023.

Les mesures précitées s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2023. De ce fait, à partir de janvier 2024, et en l’absence des mesures additionnelles, les prix à la consommation devraient connaître un ajustement à la hausse, en particulier ceux de l’énergie. En 2024, le STATEC prévoit ainsi une hausse du prix du gaz et de l’électricité de respectivement 37% et 78%. Cette prévision découle directement de l’évolution des prix sur les marchés dérivés et du mode d’approvisionnement des fournisseurs d’énergie au Luxembourg. En effet, une grande partie de l’électricité qui sera fournie en 2024 a déjà été achetée au cours de 2021 et 2022 au prix du marché qui prévalait à ce moment. Ces achats anticipés permettent d’avoir une vue relativement claire sur les tarifs de l’électricité qui seront facturés en 2024. En ce qui concerne le gaz, les incertitudes sont plus élevées en raison de la structure du marché : la plupart des achats s’effectuent seulement quelques mois avant la date de livraison. Par conséquent, les prévisions s’appuient principalement sur les anticipations du marché (au mois de janvier 2023) pour l’année 2024. Il va sans dire que dans le contexte actuel de fortes instabilités géopolitiques, les anticipations de prix des marchés sont très volatiles et les prévisions qui en découlent à l’horizon 2024 sont à considérer avec prudence.

Selon les prévisions d’inflation du scénario central, une tranche (après celles de février et avril) serait payée au 4e trimestre 2023 à laquelle s’ajouterait un nouveau paiement au 2e trimestre 2024.

Prévisions selon des hypothèses alternatives sur les prix de l’énergie

Source : STATEC (prévisions du 06/02/2023)

* Le paiement d’une tranche indiciaire est prévu au mois d’avril 2023 conformément à la loi du 29 juin 2022.

** Prix moyens TTC pour un client résidentiel au Luxembourg avec une consommation annuelle de 2 362 m3 de gaz et 4 623 kWh d’électricité. Ces prix sont calculés en supposant i) pour le gaz : les tarifs d’utilisation du réseau resteraient constants à leurs niveaux de 2023, à différence que ces derniers ne seraient plus financés par l’Etat ; ii) pour l’électricité : la contribution au mécanisme de compensation reviendrait à 1.85 centimes EUR/kWh (soit le niveau de 2022) à partir de 2024 et les tarifs d’utilisation du réseau resteraient constants à leurs niveaux de 2023.  Ces derniers pourraient néanmoins évoluer suite à la révision prévue en 2024 des méthodes de détermination des tarifs d’utilisation des réseaux de l’électricité. 

Deux scénarios alternatifs selon l’évolution des prix énergétiques

A partir des marchés dérivés, il est possible de distinguer deux scénarios de prix reflétant les anticipations les plus optimistes ou pessimistes sur les prix de l’électricité et du gaz en 2024. S’y ajoutent des évolutions alternatives du prix du Brent en 2023 et 2024 établies à partir des déviations historiques. Ainsi, deux scénarios sont considérés selon l’évolution des prix du gaz, de l’électricité et du baril de Brent (ce dernier se répercutant sur les prix du diesel, de l’essence et du mazout de chauffage). Le scénario haut suppose qu’en 2024, le gaz, l’électricité et le Brent connaitraient des hausses de 87%, 91% et 15%, respectivement. Le scénario bas anticipe une augmentation plus faible du prix de l’électricité (+71%) et du gaz (+15%) et une baisse du prix du Brent (-25%) en 2024.

Le scénario bas ne prévoit pas de nouvelle indexation en 2023 (après celles de février et avril), mais anticipe deux indexations en 2024 : une au 1er trimestre et une autre au 3e trimestre. Le scénario haut anticipe une nouvelle indexation (après celles de février et avril) au 3e trimestre de 2023, suivi de deux indexations en 2024 : au 1er trimestre et au 2e trimestre.

D’autres incertitudes pouvant impacter les prévisions d’inflation ne sont pas prises en compte dans cette prévision.  

Du côté baissier, les effets de l’assouplissement de la stratégie « zéro COVID » en Chine qui devraient détendre les chaînes d’approvisionnement et ralentir l’inflation (au moins à long-terme) ne sont pas explicitement quantifiés. Les scénarios alternatifs n’évaluent pas non plus l’impact d’un cours de l’euro vis-à-vis du dollar différent de celui du scénario central. Une plus forte appréciation de l’euro ralentirait davantage l’inflation sous-jacente via des prix importés moins élevés en Europe.

Du côté des risques haussiers, un désancrage éventuel des anticipations d’inflation mènerait les ménages et les entreprises à fonder leurs revendications de salaires et de prix sur l’inflation récente, ce qui aggraverait la persistance de l’inflation. S’y ajoutent les effets indirects sur les prix à la consommation, notamment lorsque les prix de l’énergie flambent. Ces effets ne sont pas repris ici puisque tous les scénarios considèrent uniquement les impacts directs des prix énergétiques sur l’inflation. Or certaines entreprises peuvent être forcées d’arrêter leur activité en cas d’emballement des prix énergétiques provoquant des contraintes d’offre et exerçant une pression à la hausse sur les prix finaux. En outre, les tensions sur le marché du travail pourraient s’intensifier et augmenter les risques d’une boucle prix-salaire (effets de second tour).

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