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Digitalisation, inégalités et risque de pauvreté Rapport travail et cohésion sociale 2023
À l’occasion de la journée internationale pour l'élimination de la pauvreté du 17 octobre, le STATEC se penche sur la cohésion sociale du pays.
Knowledge workers
Le Luxembourg est en voie d’être une nation digitale. En effet, les compétences numériques dominent les taches professionnelles. 47% des personnes en emploi les appliquant constamment ou presque (branche financière, TIC, scientifiques etc.). Cette position de leader digital en Europe contraste fortement avec la faible prévalence des tâches manuelles des travailleurs résidents, situation similaire à celle de la Suède et des Pays-Bas.
Une série d’indicateurs ont permis de classer les emplois et les taches selon leur nature cognitive, manuelle, interactive, uniforme ou le degré d’autonomie. En ce qui concerne les tâches cognitives, 45% des personnes en emploi ou récemment en emploi[1] appliquent constamment ou presque constamment des compétences numériques dans leur environnement professionnel. En revanche, moins d’un tiers des personnes en emploi ou récemment en emploi exercent des tâches manuelles, dont seulement 6 à 8% en réalisent constamment. Les interactions sociales jouent également un rôle significatif, avec une personne sur cinq communiquant en permanence, que ce soit en interne ou en externe dans le cadre de leur travail, et une personne sur dix effectuant des activités de conseil la plupart de son temps.
Le télétravail, s’est installé
Apparu massivement durant la pandémie et les mesures de confinement (il avait atteint un pic de 52%, contre 20% en 2019), le télétravail s’est installé dans les entreprises. Au deuxième trimestre de l'année 2023, le télétravail était une réalité pour 32% des résidents employés au Luxembourg. Le télétravail a ajouté une ligne de fracture supplémentaire entre les employés qui peuvent recourir à cette facilité et les autres. En effet, le travail à distance est plus courant parmi les cols blancs qualifiés, ceux qui exercent des tâches d’envergure cognitives et autonomes. Il concerne 57% des cadres et des professions intellectuelles et scientifiques, et 25% des professions intermédiaires. En revanche, seuls 11% des cols blancs peu qualifiés, et de 1 à 3% des cols bleus, qui effectuent plutôt des tâches manuelles, peuvent pratiquer le télétravail.
Autre dimension d’ajustement/disparité, le travail à temps partiel présente un visage majoritairement féminin au Luxembourg, mais il résulte aussi d’un choix volontaire. Près d’une femme sur trois recourt au temps partiel. Bien que l'on constate une augmentation du nombre d'hommes travaillant à temps partiel, leur proportion reste nettement inférieure à celle des femmes, 7.1% contre 30.9%.
Avoir un emploi ne met pas toujours à l’abri du risque de pauvreté
Les employés n’ont pas tous le privilège d’être des knowledge workers, au salaire relativement élevé. En 2022, 12.9% des travailleurs au Luxembourg étaient en situation de risque de pauvreté. Plus de la moitié des travailleurs en situation de pauvreté opèrent dans quatre secteurs d'activité spécifiques, à savoir la construction, l'hôtellerie-restauration, la santé et le commerce. Les autres catégories de travailleurs qui se trouvent relativement plus exposées au risque de pauvreté sont les travailleurs temporaires, les employés à temps partiel, les ressortissants extra-européens et des personnes avec un niveau d'éducation moins élevé. La présence d'enfants à charge dans un ménage accroît le risque de pauvreté parmi les travailleurs. Les minima sociaux (REVIS, salaire social minimum) ne constituent pas toujours une protection suffisante contre le risque de pauvreté, en particulier pour les ménages avec enfants. Le coût de la vie élevé aux Luxembourg, et particulièrement les dépenses liées au logement, font que les besoins des ménages ne sont pas toujours entièrement couverts.
Pouvoir d’achat en hausse, risque de pauvreté en (légère) baisse
Selon les prévisions du STATEC, le niveau de vie moyen des résidents au Luxembourg augmente de 7.7% pour passer de quelque 3 745 EUR en 2021 à 4 032 EUR/personne en 2022. Cette augmentation dépasse l’inflation annuelle (6.3%). L’explication de cette progression réside dans l’indexation d’avril 2022 et des mesures prises par la Tripartite (crédit d’impôts et les aides octroyées en réponse à la hausse des dépenses énergétiques, notamment la hausse de l’allocation de vie chère et les primes liées à l’énergie), ainsi que des hausses de salaires dues au marché du travail tendu.
Le taux de pauvreté est en légère baisse par rapport à l’année précédente en passant de 18.1% à 17.4% en 2022 ! L’indicateur subjectif « avoir du mal à joindre les deux bouts », va dans la même direction, il recule également.
Le revenu « reste à vivre »
En 2022, près de 9 ménages sur 10 ont déclaré que leur charge relative au logement était soit importante, soit moyennement importante. Cette situation touche presque tous les types de ménages, y compris 82% des ménages les plus aisés et 91% des ménages les plus défavorisés. Pour les ménages du premier quartile de revenu, la charge du logement, mesurée à partir des données monétaires observées, est particulièrement préoccupante, représentant 57.9% de leur revenu disponible.
Or, les ménages ne peuvent pas utiliser le revenu théoriquement disponible : certaines dépenses obligatoires comme le loyer, les remboursements d’emprunt, les assurances, etc. sont inévitables. Les ménages les moins aisés voient plus de 60% de leur revenu disponible absorbé par ces dépenses, tandis que cette proportion diminue à 20% pour les ménages les plus aisés. En 2022, le « reste à vivre » pour la consommation, calculé en soustrayant les dépenses pré-engagées du revenu disponible, s'élevait en moyenne à 4 624 EUR par mois et par ménage et seulement à 1 121 EUR/mois pour les 10% des ménages les plus modestes. En tenant compte de ce revenu véritablement disponible, le taux de risque de pauvreté grimpe en moyenne à 21%.
D’un autre côté, le taux de risque de pauvreté, basé uniquement sur le revenu disponible, cache des ressources du ménage qu’il faudrait prendre en compte. Le STATEC calcule aussi, pour refléter cette réalité, un taux de risque de pauvreté multidimensionnel qui tient compte du revenu, de la consommation et du patrimoine : ce taux diminue en 2022 par rapport à 2021, il passe de 7.3% à 3.9%.
[1] Les personnes ayant quitté leur emploi au cours de 2 dernières années sont incluses.
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Cette publication a été réalisée par le Département Statistiques Sociales sous la direction de Jérôme Hury.
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