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Conjoncture Flash Mai 2025: Zone euro: plutôt un bon début d’année, mais après?
La croissance de l’activité s’est légèrement renforcée au 1er trimestre de l’année en zone euro, avec des tendances cependant contrastées entre ses principales économies. Les enquêtes de conjoncture du 2e trimestre témoignent d’une perte d’élan des activités de services, ressentie également au Luxembourg.
Au 1er trimestre 2025, le PIB de la zone euro a progressé de 0.3% sur un trimestre (après +0.2% au 4e trimestre 2024). Parmi les principales économies de la zone euro, et comme sur les trimestres précédents, l’Espagne demeure l’une des plus dynamiques, avec une hausse de 0.6% sur un trimestre. L’activité y est portée par l’ensemble des composantes de la demande intérieure (consommation privée, publique et investissements, avec une contribution de 0.4 point de %) ainsi que de la demande extérieure (0.2 point). L’Allemagne reprend du souffle avec un PIB en hausse de 0.4%, son meilleur résultat depuis plus de deux ans[1]. Le commerce extérieur y a apporté une contribution élevée, avec un net rebond des exportations de biens, notamment des produits pharmaceutiques, des voitures, et des remorques et semi-remorques, soit des catégories d’exportations importantes pour le marché américain. Ce mouvement est susceptible d’être lié aux anticipations de hausse des tarifs douaniers US[2] et pourrait ainsi n’être que temporaire. La consommation des ménages allemands (+0.5%) s’est cependant montrée plus dynamique que sur les précédents trimestres et l’investissement aussi (en hausse pour le 2e trimestre consécutif aussi bien pour la construction que pour les machines et équipements).
L’Italie enregistre également un bon résultat, avec une progression de 0.3% (la plus forte depuis deux ans), sous l’effet notable des performances de son secteur agricole et de l’industrie. La France montre un rebond modéré, de +0.1% sur un trimestre (après une baisse de 0.1% au 4e trimestre, marqué par le contrecoup des Jeux olympiques). Cette reprise modeste résulte surtout d’un accroissement des stocks, les autres composantes de la demande témoignant d’un climat moins porteur : stagnation de la consommation des ménages, repli de l’investissement (-0.2%, après déjà une baisse de 0.1% au trimestre précédent) et contribution négative du commerce extérieur (avec une baisse des exportations de 0.7%, contre +0.2% au T4 2024).
Vers un ralentissement des activités de services en zone euro et au Luxembourg ?
Les perspectives pour le 2e trimestre semblent moins favorables. Les enquêtes de conjoncture signalent en effet une dégradation du ressenti des entreprises de services. L’indice composite d’activité PMI pour la zone euro s’était déjà replié en avril et poursuit le mouvement en mai, repassant pour la première fois depuis 5 mois sous la barre des 50 points, indiquant une légère contraction de l’activité.
[1] Et meilleur qu’initialement dévoilé puisque selon les premières estimations, la progression de l’Allemagne ressortait à seulement 0.2% sur le 1er trimestre.
[2] https://www.destatis.de/EN/Press/2025/05/PE25_182_811.html
Indices PMI pour la zone euro
Sources: HCOB, S&P Global PMI
Ce repli provient des activités de services, qui signalent en particulier la faiblesse de la demande intérieure. Cette perte d’élan du côté des services se ressent également au Luxembourg, la confiance des acteurs s’étant légèrement repliée de février à avril (elle est demeurée stable en mai), avec des vues moins positives sur la santé de l’entreprise et les perspectives de demande (notamment dans le domaine des services aux entreprises[3]).
Les opinions des industriels tendent par contre à s’améliorer. L’indice d’activité correspondant pour la zone euro de l’enquête PMI remonte pour le cinquième mois consécutif en mai (la confiance des industriels au Luxembourg a plutôt eu tendance à se stabiliser sur cette période). Le communiqué de presse accompagnant les résultats de mai indique que l’entrée en vigueur des nouveaux droits de douane américains - avec un taux de « seulement » 10% pour les pays de l’UE jusqu’au 8 juillet - pourrait avoir favorisé l’activité industrielle. Il reste à voir comment vont se dérouler les choses dans ce domaine : dans un énième renversement de situation, le président Trump a menacé le 23 mai de porter les droits de douane US sur les produits européens à 50% dès le 1er juin, avant de repousser cette échéance au 9 juillet deux jours plus tard (pour laisser la place à d’éventuelles négociations).
[3] Et en particulier du côté des activités juridiques et comptables, de celles relatives aux sièges sociaux et au conseil de gestion, des services de location et des voyagistes.
Activité
Enquêtes de conjoncture dans la construction
Sources : Commission européenne, STATEC (données désaisonnalisées, provisoires pour mai). Note : l’indicateur de confiance est la moyenne des soldes d’opinions sur l’état du carnet de commandes et des perspectives d’évolutions d’emploi.
La confiance remonte timidement dans la construction
La confiance dans le secteur de la construction, qui était en chute libre depuis le début de 2022, commence à montrer des signes d’amélioration. En légère hausse sur les derniers mois, elle demeure toutefois à un niveau faible, bien inférieur à sa moyenne de long-terme.
Depuis le début de l’année, la part des entreprises estimant leur carnet de commandes insuffisant recule, alors qu’elle augmentait sans cesse jusque fin 2024. De plus, les appréciations sur l’activité récente semblent avoir cessé de se dégrader (elles auraient même augmenté selon les données provisoires de mai) et la part d’entreprises signalant une demande insuffisante a arrêté d’augmenter (malgré un niveau très élevé, autour de 60%). Ces évolutions positives concernent plus particulièrement le domaine du bâtiment et font notamment écho à la reprise récente observée sur les transactions de logements neufs.
Les perspectives d’évolution de l’emploi ont atteint un creux sur la fin de 2024 et tendent à s’améliorer légèrement depuis. Par ailleurs, la part d’entreprises déplorant un manque de main-d’œuvre, en nette baisse depuis la mi-2022, s’est stabilisée récemment. Par contre, de plus en plus d’entreprises se disent limitées par des contraintes financières (plus de 20% actuellement).
Environnement financier
Projections sur les taux directeurs
Source : FMI (prévisions d'avril 2025 par rapport à celles d'octobre 2024 représentées en pointillés)
Une baisse des taux en zone euro relativement forte et rapide
La plupart des grandes économies avancées ont continué à réduire les taux d’intérêt directeurs sur les derniers mois. En zone euro, trois baisses ont déjà eu lieu cette année, et deux supplémentaires (de 25 points de base chacune) sont attendues en 2025 selon le FMI et l’OCDE, compte tenu de la prédominance des risques baissiers sur les perspectives d’inflation et de croissance. Aux États-Unis, le taux directeur devrait être moins abaissé que ce qui était escompté à l’automne 2024, avec des prévisions d’inflation au-dessus de l’objectif, quel que soit le scénario sur les droits de douane. Un assouplissement progressif est également prévu au cours des deux prochaines années en Australie et au Royaume-Uni. Au Canada, les taux directeurs devraient être encore abaissés, avec une ampleur très incertaine (celle-ci dépendra beaucoup des décisions sur les droits de douane).
Au Japon et au Brésil par contre, les taux directeurs devraient être relevés progressivement pour garantir que les anticipations d’inflation restent bien ancrées.
Secteur financier
Décisions des banques sur les marges des prêts au Luxembourg
Source: BCE (enquête sur le crédit bancaire, moyennes mobiles sur 3 trimestres)
Les conditions d’emprunt des ménages s’assouplissent
Avec l’abaissement des taux directeurs, les coûts d’emprunt continuent à diminuer pour les entreprises et les ménages au Luxembourg. Le taux d’intérêt a atteint en mars 3.8% sur les prêts immobiliers à taux variable (-1.1 point de % sur un an), 4.0% sur les nouveaux prêts à la consommation (-0.5 point de %) et 3.1% sur ceux aux entreprises (-0.5 point de %). Le taux fixe appliqué sur les nouveaux prêts immobiliers est légèrement reparti à la hausse au 1er trimestre (+0.2 point de % entre mars 2025 et décembre 2024, -0.2 point de % sur un an), porté par la remontée des taux à long terme en zone euro.
Au 1er trimestre 2025, les banques au Luxembourg ont assoupli les conditions générales de crédit à la consommation, selon l’enquête sur le crédit bancaire. Cet assouplissement s'explique principalement par la baisse des taux et le resserrement des marges sur les prêts. Les conditions sur les prêts immobiliers sont inchangées, après avoir été assouplies au dernier trimestre de 2024 via la durée des contrats. En revanche, les critères et conditions d’octroi de crédits aux entreprises ont encore été durcis (surtout les marges et les frais autres que les intérêts) en raison de perspectives économiques dégradées et d’une hausse des risques relatifs aux garanties requises et des coûts liés aux fonds propres.
Tourisme
Nuitées en hébergements touristiques
Source : STATEC
Bon démarrage pour le tourisme
Le Luxembourg a fait bonne figure l’an passé pour ce qui concerne la fréquentation touristique. Le nombre d’arrivées dans les établissements d’hébergement y a progressé de presque 7%, contre seulement 2% à l’échelle de la zone euro (avec cependant de très bons résultats pour l’Espagne, le Portugal, Malte et la France). Et pour la première fois, le Luxembourg a dépassé en 2024 la barre des 1.5 million de visiteurs.
Même s’il ne s’agit pas de la période la plus chargée pour l’accueil des touristes, le 1er trimestre de l’année en cours indique une poursuite sur cette lancée positive pour les établissements du Grand-Duché, avec une hausse des arrivées de 7.3% sur un an (contre une baisse de 0.3% enregistrée en zone euro sur la même période). En termes de nuitées, la hausse s’élève à presque 10% sur la même période, indiquant par-là même une légère progression de la durée de séjour moyenne.
Inflation
Contributions à l'inflation en 2025, 4 mois
Source : STATEC
L’inflation au Luxembourg demeure faible par rapport à la zone euro
Sur le début de l’année 2025, l’inflation au Luxembourg demeure, comme sur l’ensemble de 2024, inférieure à celle mesurée en zone euro (1.7% contre 2.3% sur les 4 premiers mois de l’année), et ce pour 8 des 12 divisions de l’indice des prix à la consommation. Les prix des « biens et services divers », des restaurants et hôtels ainsi que des produits alimentaires et boissons non alcoolisées ont en effet moins progressé au Luxembourg. Parmi les divisions qui connaissent une inflation plus importante au Luxembourg, on note surtout celle du « logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles », ce qui s’explique principalement par le relèvement des prix de l’électricité suite à la levée partielle des boucliers tarifaires, apportant ainsi 0.4 point de % à l’inflation.
Sur les prochains mois, l’inflation du Luxembourg devrait remonter quelque peu, sous l’effet de l’indexation des salaires intervenue en mai 2025. Ainsi, dans les dernières prévisions, le STATEC table sur une inflation à 1.9% en 2025 et 2026, relativement proche de la dernière projection de la Commission européenne pour la zone euro (2.1% en 2025 et 1.7% en 2026).
Marché du travail
Emploi dans le secteur financier
Sources: IGSS, Eurostat
* janvier et février 2025
Le secteur financier ne crée plus beaucoup d’emplois
Les créations d’emploi ont nettement ralenti dans le secteur financier. Au 4e trimestre 2024, la croissance annuelle passe à 0.9%, après encore presque +4% au dernier trimestre de 2022. Les données préliminaires du 1er trimestre montrent une progression de seulement 0.3%, soit le rythme observé fin 2020, en pleine crise COVID. C’est surtout dans la gestion de fonds d’investissement et de pension que l’emploi a nettement freiné (+0.2% sur un an en T4 2024 et T1 2025, après encore +2.5% fin 2022). Cette sous-branche reste toutefois créatrice d’emplois au début de 2025, tout comme les sociétés de participation financière (SOPARFIs) et les assurances. En revanche, l’emploi se replie légèrement dans les établissements de crédit (-0.1% sur un an) et – de manière plus appuyée – dans les autres sous-branches (notamment suite à des restructurations).
En zone euro, où l’emploi dans ce secteur a connu depuis 2021 une progression bien plus faible qu’au Luxembourg, les créations repartent légèrement à la hausse, atteignant +1.0% sur un an en T4 2024, après encore -0.2% en T3 2022. La reprise sur la fin de 2024 provient surtout de l’Allemagne, de l’Irlande et de l’Espagne. La France et les Pays-Bas enregistrent par contre, comme le Grand-Duché, un ralentissement.
Énergie
Ventes de carburants au Luxembourg
Sources : Ministère de l'Economie, STATEC (données désaisonnalisées)
Les ventes de carburants continuent à décliner
Les ventes de carburants au Luxembourg poursuivent la tendance baissière entamée en 2019. Sur les quatre premiers mois de 2025, les ventes ont reculé de presque 4% par rapport à la même période de l’année précédente. Cette diminution relève des ventes de diesel, qui ont chuté de plus de 7% sur la même période. D’une part, le nombre de voitures roulant au diesel dans le parc luxembourgeois est en baisse continue (un tiers de moins depuis 2019). D’autre part, le différentiel de prix avec les pays frontaliers s’est progressivement réduit au cours des dernières années, notamment en raison de l’augmentation continue de la taxe CO2 au Luxembourg, ce qui a par ailleurs largement contribué à atteindre ses objectifs climatiques. Pour le diesel professionnel, le différentiel s’est même inversé, celui-ci étant désormais moins cher en Belgique et en France qu’au Luxembourg.
Les ventes d’essence ont cependant progressé de 6% au début de l’année, même si le nombre de voitures roulant exclusivement avec de l’essence au Luxembourg s’est stabilisé. La hausse s’explique surtout par l’émergence des voitures hybrides, qui sont pour la plupart équipées avec des moteurs à essence en complément de leur moteur électrique.
Tableau de bord
Source : STATEC
Cvs - corrigé des variations saisonnières, CNT - Comptes nationaux trimestriels
1 Estimations sur base de données semestrielles
Repères
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