NDC-1-23-Préface

Une conjoncture au ralenti


Le STATEC avait alerté le gouvernement et les partenaires sociaux, au cours des négociations
tripartites de l’année passée, que les perspectives économiques étaient en train
de s’assombrir dans certaines branches liées au bâtiment (construction et immobilier)
et dans l’industrie. Certes, la zone euro s’est montrée plutôt résiliente face aux hausses
des prix de l’énergie, à la politique monétaire restrictive de la BCE et aux difficultés
d’approvisionnement provenant d’Asie. En effet, l’économie européenne a évité la
récession tant redoutée. Les tensions géopolitiques, à commencer par la terrible guerre
d’agression de l’Ukraine, pèsent sur le moral des entreprises et des consommateurs qui
voient le "dividende de paix" hérité de la fin de la Deuxième Guerre Mondiale s’évaporer.
Au Luxembourg, les négociations tripartites de mars de cette année ont permis de ficeler
un accord plus global qui prolonge le bouclier des prix de l’énergie (gaz, électricité) et
crée, notamment, un nouveau crédit d’impôt "conjoncture". Le budget de l’État prendra
également à sa charge une partie de la tranche indiciaire qui devrait échoir au troisième
trimestre 2023, délestant ainsi quelque peu les entreprises.


Au Luxembourg, l’inflexion de la dynamique économique se perçoit sur de nombreux
indicateurs conjoncturels, notamment du PIB, au tournant de 2022 et 2023. Le marché
du travail devrait se refroidir, alors que les prix des produits alimentaires battent des
records. Comme le montre la présente Note de conjoncture, les augmentations du
revenu disponible (grâce aux aides, crédits d’impôts et aux tranches indiciaires) devraient
bénéficier aux ménages défavorisés, mais surtout aux plus fortunés. La contrepartie
des aides de l’État est un déficit significatif des comptes publics cette année et l’année
prochaine.


Dans ce contexte, le STATEC a révisé ses prévisions de croissance du PIB à la baisse:
+1.5% cette année et +2.5% l’année prochaine. En raison de la forte incertitude, le STATEC
fournit également des prévisions alternatives, notamment en cas de dégradation de la
conjoncture européenne.

La présente Note de conjoncture contient plusieurs études importantes
qui approfondissent des questions clés


Citons l’étude sur la construction et les prix immobiliers qui vient éclairer une branche
dont le dynamisme semblait ininterrompu depuis des décennies. Or, on y apprend que
les hausses des taux d’intérêt et le durcissement des conditions de crédit hypothécaire
ont conduit à une baisse des demandes de crédit, des volumes de crédit et du nombre
de transactions de logements. Il faut s’attendre à un effet négatif sur l’activité et l’investissement
dans la construction. L’investissement dans le logement s’est d’ailleurs replié
plus fortement au Luxembourg que dans la zone euro sur la fin de 2022.


Une étude méthodologique expose les hypothèses et les astuces statistiques permettant
de réaliser des prévisions du prix du gaz et de l’électricité à court terme. Cette méthode,
plus proche du terrain, exploitant les données des marchés européens et s’appuyant
également sur un échange avec Enovos, le fournisseur d’électricité et de gaz, a permis
des prévisions plus fiables des prix de l’énergie.


Enfin, dernière étude, celle décrivant la stratégie de décarbonation de l’économie luxembourgeoise,
traduite dans le PNEC (Plan national intégré en matière d’énergie et de climat).
En effet, les principales mesures tarifaires (hausses de la taxe CO2) ou réglementaires
(passage aux véhicules électriques ou aux pompes à chaleur dans les bâtiments) ont été
simulées grâce à des modèles structurels et de long terme, développés au STATEC au
cours des dernières années. Les résultats de ces simulations, réalisées en collaboration
avec les ministères de l’Énergie et de l’Environnement, ont été exposés dans différents
séminaires ouverts au public. L’étude montre que le PNEC réalise une croissance verte
en découplant l’usage de ressources énergétiques fossiles et la production potentielle
jusqu’en 2050.


Les prévisions du STATEC renseignent les émissions de CO2 à côté des indicateurs
conjoncturels traditionnels.

Dr Serge Allegrezza

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